Crise a l'est du pays: le leadership du president Joseph Kabila en question
La recente crise a l'est du pays, cette partie de la Republique qui, a en croire le verdict des urnes, avait massivement vote pour le president Joseph Kabila aux elections presidentielles de 2006, ressuscite la question de son leadership.
En effet, une des promesses que le president Joseph Kabila avait faite a la population congolaise juste apres sa victoire etait celle de ramener la paix dans ce coin du pays. Et par ce fait, « parachever le chantier de la reconstruction nationale, valoriser le travail et bannir toutes les anti-valeurs, dont notamment la xenophobie, le tribalisme, l'intolerance, l'exclusion, l'incitation a la haine, la corruption et l'injustice sous toutes ses formes, pour faire de la RDC un pays uni, fort et prospere ».
Apres avoir assume le levier de commande de la Republique Democratique du Congo pendant plus de sept ans, et deux de ces annees apres les elections reconnues par nombre des temoins tant nationaux qu'internationaux en matieres electorales, comme etant democratiques, libres, et transparentes, il est important que le peuple congolais evalue son leadership en considerant un certain nombre de points.
1. La capacite de forger des alliances
Savoir creer les alliances militaires avec des etats amis est un grand atout pour un chef d'etat. L'histoire du Congo-Kinshasa nous renseigne que grace aux alliances avec les belges, les francais, les americains et les marocains, le president Mobutu a pu mater des mouvements insurrectionnels (Shaba I et Shaba II) au Katanga. Recemment, le president Laurent Desire Kabila n'aurait pu resister a ses anciens allies ruandais, burundais et ougandais, n'eut ete les alliances qu'il a pu habilement forger en un temps record avec l'Angola, la Namibie, le Tchad, et le Zimbabwe. Le president Laurent Desire Kabila n'avait pas encore fait deux ans au pouvoir quand il avait reussi cet exploit. Et bien plus, il n'avait meme pas encore beneficie de la legitimite dont jouit aujourd'hui son successeur, le president Joseph Kabila.
Jusqu'a preuve du contraire, le president Joseph Kabila, qui est au pouvoir depuis 2001, n'a pas encore reussi a reunir une coalition capable de l'aider a se defaire de l'ancien officier de l'armee rwandaise Nkundabatware Mihigo qui, comme tout autre extremiste tutsi rwandais, se fait passer pour un tutsi congolais, juste pour promouvoir les ambitions territoriales, economiques, et hegemoniques des extremistes Tutsi rwandais au Congo.
Qu'est-ce qui manque au president Joseph Kabila? Est-ce le pouvoir de persuasion? Est-ce le manque de confiance des autres chefs d'etat Africains? Ou peut-etre, croit-il fermement a la force de frappe des forces armees de la Republique Democratiques du Congo (FARDC) dont il est le commandant supreme?
Etant donne que les commandants des operations de FARDC qui operent dans le Grand Kivu n'arrivent toujours pas a se debarrasser de Nkundabatware Mihigo, chose que le general Mbuza Mabe avait pourtant reussi avec brio en chassant Nkundabatware et son compagnon de lutte, le colonel Jules Mutebusi, du Sud Kivu, il est urgent que le president Joseph Kabila exploite cette option de la creation des alliances militaires avec des etats amis pour effectivement etendre l'autorite de l'etat sur le Grand Kivu .
Le gouvernement congolais doit cesser de naivement compter sur les casques bleus de la MONUC pour atteindre cet objectif. Le cas de haute trahison du colonel indien de la MONUC, le colonel Chand Saroha, qui commandait les operations sur terrain lors de la chute de Mushake est tres illustratif a ce sujet.
Definitivement, disons que la MONUC semble intentionnellement ne pas vouloir aider les FARDC a faire cesser l'occupation de l'est du Congo militairement par le Rwanda via Nkundabatware Mihigo et autres extremistes Tutsi interposes. Ainsi, etant membre du SADEC et de la CEEAC dont il est le president en exercice, le president Joseph Kabila et son gouvernement ne devront pas avoir honte de solliciter l'appui militaire des pays membres de ces deux groupements regionaux pour mettre fin aux aventures des extremistes Tutsi rwandais au Congo qui luttent pour poursuivre la lutte du RCD-Goma.
2. L'inefficacite de sa strategie communicationnelle
Dans une de ses declarations a la presse, le president Joseph Kabila disait qu'il etait plus un homme d'action qui aimerait etre juge par les actes qu'il pose, et non par des discours propagandistes. A ceux-la qui lui reprochaient de ne pas souvent communiquer avec le peuple, il disait que le peuple Congolais etait trop habitue aux discours et qu'il voulait changer cette maniere de travailler.
Seulement voila ! Le role d'un chef d'etat, c'est aussi de rassurer une population en insecurite, de calmer un peuple qui s'inquiete, de determiner la direction que le pays doit prendre, etc . D'apres la Constitution de la RDC , le president de la Republique incarne l 'autorite de l'Etat . Il a le devoir de veiller au respect du texte constitutionnel, et d'assurer le fonctionnement normal des pouvoirs publics et la continuite de l'Etat. Il est le garant de l'independance nationale et de l' integrite du territoire.
Ainsi, le mutisme du president face aux questions de grand interet national est plus que surprenant. Comment explique-t-il son silence a la question sensible de la circulation de la population dans le Katanga ? Son ministre de l'interieur Denis Kalume venait de signer un arrete qui n'est ni suivi ni respecte par le ministre de l'interieur du Katanga, ni par le maire de Lubumbashi, et encore moins par le president de l'assemblee provinciale du Katanga. Comment se taire devant une telle question qui peut avoir des effets d'entrainement negatifs dans d'autres provinces du pays?
Comment se taire surtout quand on sait ce qui s'est passe dans cette province dans les annees soixante; et en 1992 lorsque Mr. Kyungu wa Kumwanza, alors gouverneur du Katanga, traitait les Kasaiens des «Vidudu», c'est-a-dire les insectes qu'il fallait exterminer a tout prix?
Comment ne pouvait-il pas rassurer la population de Kinshasa face a l'insecurite grandissante ? Un vice-president de l'assemblee provinciale est assassine, un ancien ministre de la defense est crible des balles, un grand sportif attaque, etc.; Comment un chef d'etat peut-il demeurer si silencieux devant des telles situations ? Qui doit donc rassurer la population a sa place ?
Disons-le, et a haute voix : la vision du president Joseph Kabila en matiere de communication est anachronique avec la gestion des etats modernes et democratiques.
En effet, le president Kabila ne peut expliquer au peuple Congolais son silence et son inaction en ce qui concerne des sujets d'interet national notamment le dossier Bundu dia Kongo, le recent dossier du detournement de 1.3 milliard de dollars dans six entreprises publiques et trois regies financieres, la corruption dans tous les secteurs de la vie, l'exploitation du gaz methane des eaux du lac Kivu par le Rwanda, la presence des rebelles hutus rwandais au Congo, la presence des soldats tutsi rwandais au Congo, la presence des rebelles ougandais au Congo, l'exploitation illegale des ressources du parc Virunga par les troupes du rebelle Nkundabatware Mihigo au profit du Rwanda, etc . Qui va expliquer ces dossiers a notre peuple ?
3. L'inefficacite du leadership du president Joseph Kabila
Il y a, certes, de Congolais qui apprecient le style de leadership du president Kabila. On nous apprend qu'il parle moins mais travaille beaucoup. Cependant, nous y decelons quelques defaillances, et non de moindre. En effet, quand on visite les institutions d'enseignement superieur et universitaire, pour ne citer qu'un cas, on se rend compte qu'en depit des frais que les etudiants paient, les chefs de certaines de ces institutions ne voient pas l'urgence d'equiper leurs institutions en bancs, en ordinateurs, ou meme d'y assurer la proprete .
Il est inconcevable que des chefs d'etablissements scolaires ou academiques ne craignent rien. On ne sent pas l'urgence dans leurs chefs, le genre d'urgence qui motive le gouverneur du Katanga dans la reconstruction de sa province. Comment peut-on percevoir $150 aupres de 5000 etudiants, et ne pas penser a acheter un seul microscope, un seul ordinateur, ou des simples bancs ? Comment comprendre que des etudiants dans une universite « nationale » suivent une formation sur « l'enseignement a distance » sans un seul ordinateur ? Comment expliquer des voyages repetes des ministres a l'etranger alors que le gouvernement ne peut meme pas equiper une seule universite du Congo?
Il existe des bureaux des communes a Kinshasa qui, bien que collectant et amassant de grosses sommes d'argent, continuent a attendre que le gouvernement central les equipe en logiciels informatiques et autres fournitures de bureaux. Incroyable, mais vrai.
L'argent de l'etat va dans les poches des individus sans que ces individus aient peur des sanctions. Des fonctionnaires de l'etat recoivent ouvertement des pourboires pour accepter d'offrir des contrats du gouvernement aux entreprises bidon sans se faire inquieter par qui que ce soit. Voila pourquoi rien ne semble marcher a Kinshasa et a l'interieur du pays: Il y a une absence totale d'un systeme efficace de sanction et de recompense.
Bien plus, il y a deux ans que le president Joseph Kabila declarait que la recreation etait finie. Rien ne semble avoir change, monsieur le president. Au contraire, les vieilles tares continuent a ronger la gestion du pays. Pourquoi les gestionnaires des entreprises publiques, des etablissements scolaires et universitaires, des hopitaux, des bureaux de l'etat, etc. n'ont pas conscience que les biens qu'ils gerent appartiennent a l'etat ? C'est la la grande interrogation ? Des taxes sont percues chaque jour dans les villes du pays sans que les autorites pensent a utiliser cet argent pour ameliorer la qualite de la vie de la population. Pourtant, la pression qu'elles exercent sur la population en matiere de paiement de taxes est parfois inhabituelle.
4. La ligne de Separation (de force) a l'est du pays : un danger de la kosovisation du Congo
Il va sans dire que la MONUC semble avoir un agenda cach e pour la RDC . Le fait que le commandant indien de la MONUC ait livre Mushake aux hommes de Nkunda sans susciter une action appropriee de la part du President Kabila, le commandant supreme des FARDC; et moins encore de la part du ministre congolais de la defense, et du ministre congolais des affaires etrangeres est un signe probant de la faiblesse du leadership du president Kabila.
Pour parler un peu de cette MONUC, le responsable militaire de cet organe a manifeste dernierement son indignation au fait que les FARDC ont utilise des lance-roquettes pres de Minova pour dissuader les troupes de Nkundabatware a prendre cette ville. Mais il n'a exprime aucune indignation de voir les troupes de Nkundabatware utiliser des armes lourdes venues du Rwanda. Il n'a exprime aucun sentiment negatif de voir cette grande foule de la population congolaise deplacee et delaissee a elle-meme.
Ce que le gouvernement doit savoir, c'est que Alan Doss, representant du secretaire general de l'ONU au Congo est un protege de Tony Blair, ancien premier ministre britannique. Il est arrive a ce poste grace a Tony Blair qui l'avait nomme a l'ONU. Et Tony Blair est actuellement conseiller personnel du president Paul Kagame du Rwanda. Donc, le projet de la creation d'une republique tutsi au Congo que prone Paul Kagame est appuye et avalise par Tony Blair et donc soutenu par Alan Doss. Quand il presente un plan de desengagement au gouvernement, le gouvernement ne doit pas courir pour le signer. Quand il parle de ligne de separation des troupes, il ne faut pas seulement y voir les bonnes intentions. Il faut de la prudence. Il faut faire tres attention a tous ces occidentaux evoluant a l'est du pays, y compris les consuls. Nombreux parmi ces gens representent les interets des compagnies multinationales qui exploitent les mines dans cette region et fournissent les armes aux rebelles. Ils ont tout interet a voir cette guerre se poursuivre car ils en profitent. Quant aux casque-bleus de la MONUC, ce n'est plus rare de les entendre dire : « No Nkunda, No Money ». Allez-y comprendre quelque chose.
Tant qu'il n'y aura que des congolais qui seront affectes par cette crise, il n'y aura pas d'indignation. C'est triste que lindignation mondiale se manifeste seulement si les soldats de la MONUC sont touches, si les gorilles sont tues, et si les occidentaux vivant dans ce coin sont victimes de cette guerre. La, on entendrait la communaute internationale se lever comme un seul homme pour condamner les auteurs ! Quel ordre mondial ? Si ce qui se passe au Congo aujourd'hui se passait dans un pays europeen ou asiatique, Nkundabatware serait deja en prison. Le monde ne tolererait pas que plus de 5 millions de gens meurent sans que les auteurs soient punis.
Voici pourquoi le silence du president de la republique; son inaction (ou la perception de son inaction) aux problemes cruciaux que les congolais font face au jour le jour ; son deficit communicationnel; l'absence a court terme d'actions sociales a impact direct sur le vecu quotidien des congolais ; contribuent a miner son leadership.
Conclusion
Somme toute, la Republique Democratique du Congo n'a jamais eu un chef d'etat et un premier ministre si absents et si inexpressifs depuis l'aube de son histoire. Reussir la reunification du pays, et etendre l'autorite de l'etat sur l'ensemble du territoire national, et singulierement dans le Grand Kivu, est un grand defi que le president Kabila doit gagner. Sa presence actuelle a Goma est un signe encourageant; mais encore faut-il que cette fois-ci, il en finisse une fois pour toute avec Nkundabatware Mihigo et sa clique de CNDP. En defaut de quoi, le president Joseph Kabila fera bientot partie du passe.
Il ne fait l'ombre d'aucun doute que le president Paul Kagame du Rwanda a voulu creer la diversion concernant les elections legislatives baclees au Rwanda en lancant une attaque contre les FARDC. Aussi longtemps que l'opinion internationale se focalise sur la crise au Congo plutot que l'absence d'une opposition aux elections legislatives au Rwanda, cela fait l'affaire du Rwanda.
Sur proposition d'Azarias Ruberwa, le president Joseph Kabila a fait partir le vaillant general Mbuza Mabe du Sud Kivu sans devoir une seule explication a la population. Alors qu'il etait vice-president charge de la defense du pays, me Ruberwa a confie la gestion de la logistique militaire du Congo a un ancien officier du RCD-Goma, qui est egalement un ancien officier de l'armee rwandaise comme Nkundabatware. L'armee Congolaise est donc minee et fragilisee de l'interieur. Voici pourquoi les alliances avec les pays amis sont utiles. Si ces alliances enerveraient le Rwanda, tant pis pour Paul Kagame ! Paul Kagame doit apprendre a vivre en paix avec ses voisins. S'il arrivait que les tutsi perdent le pouvoir au Rwanda un jour, ou iraient-ils encore chercher l'exil en Afrique Centrale ? L'abus de confiance du president Kagame revolte plusieurs chefs d'etat Africains meme s'ils ne le disent pas ouvertement. Dans des pays qui se respectent, Ruberwa serait traduit en justice pour haute trahison. Aujourd'hui, il est devenu donneur de lecon sur la bonne gouvernance avec sa milice du RCD-Goma, en plein Kinshasa. Alors qu'il n'a jamais fait de comptes sur sa propre gestion du territoire que controlait son mouvement a l'est du pays. Ou est la transparence?
Le president Joseph Kabila doit faire un grand effort pour comprendre que la democratie a des exigences. Se retracter derriere un mur de silence face aux problemes importants que traverse le pays est contraire a l'exigence de la transparence dans un etat democratique. L'heure est grave. Une reorientation de son leadership dans le sens de l'efficacite s'impose.
Congo Vision
contact@congovision .com
18/9/2008
Coeur
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