Sunday, September 21, 2008

LA GUERRE DE NKUNDA,

UNE GUERRE VIDE DE SENS POURTANT SOUTENUE PAR LA COMMUNAUTE INTERNATIONALE?

Par Déo NAMUJIMBO
JOURNALISTE INDEPENDANT

Cette question qui s'impose est très difficile et je ne puis y apporter une réponse suffisante en elle même. Tout ce que je puis faire c'est donner un avis personnel. Je pense que les conflits interethniques et l'intolérance restent une réalité dans toute la RDCongo. L'Etat Nation reste une fiction pour la majorité des congolais. Il est à construire au fil du temps. Pour l'instant, les ethnies ne s'acceptent pas toujours mais convivent et cohabitent sans se faire la guerre. C'est au Nord Kivu, en Ituri et dans une partie du Sud Kivu que les tensions ethniques existantes dégénèrent en conflits ouverts et armes et ayant depuis une décennie recours aux armes modernes. Et donc ces conflits font plus des ravages qu'il y a 15 ans, qu'il y a 45 ans ou qu'il y a 120 ans. Cette situation est due aux interférences des Etats voisins et à la mauvaise gestion des conflits par la communauté internationale.

Après les élections qui l'ont dotée des institutions démocratiques,  la RDCongo devait se lancer sur le droit chemin de son indépendance économique. Ceci est vrai sur l'ensemble du territoire congolais. Seules les Nord, le Sud Kivu et l'Ituri posent de sérieux problèmes. Les efforts de reconstruction s'y butent à la présence (indésirable ? ) des groupes armés nationaux et internationaux.  Au Sud Kivu, l'insécurité est liée essentiellement à la présence des groupes armes étrangers (FDRL) et à la présence des groupes armes nationaux résiduels qui commettent plus des actes de banditismes. En Ituri,  elle est le fait des groupes armes réfractaires au processus DDR.

L'insécurité, ou mieux, les affrontements récurrents entre les groupes armés provoquent des mouvements des populations. Ces mouvements des populations qui attirent tant l'attention de la communauté humanitaire, sans être un épiphénomène ne sont qu'une manifestation de la persistance de l'insécurité ou mieux de l'entretien de l'insécurité pour des fins politiciennes.  C'est non sans raison qu'on s'apitoie sur le sort malheureux des millions des personnes déplacées vivant dans des abris de fortune aux alentours de la ville de Goma et dans les territoires de Masisi et de Rutshuru.

Pourquoi Laurent Nkunda s'oppose t'il au processus démocratique qui a pris court en RDCongo?

Au Nord Kivu, tout le monde le sait, Laurent Nkunda a refuse de rejoindre son poste  de Commandant de la 7e Région Militaire Nord Kivu. Ce qui pis est, il a organisé un groupe arme (le CNDP) qui s'est doté tardivement d'une aile politique (Constitué essentiellement des éléments recherchés par la justice nationale et rejetés par l'ancien mouvement rebelle, le RCD) dont, Patient Mwendanga,…

Au départ, le CNDP est né pour protéger la minorité Tutsi en danger selon Nkunda. Pour lui, les Tutsi ne pouvaient être défendu que par leurs frères d'ethnie. Cette conception est elle suffisante pour justifier une guerre ou du moins des affrontements a l'Est de la RDC? Personnellement, je pense qu'elle s'oppose catégoriquement à l'idée d'une armée nationale et dévouée pour la cause de tous les congolais sans distinction d'ethnies. Par ailleurs, le poste de commandant d'une région militaire basée au Nord Kivu lui donnait une belle opportunité et des moyens de mieux protéger les ethnies rwandophones contre les FDRL et éventuellement contre le PARECO, les mayi mayi…Comment comprendre ce refus de travailler dans un espace officiel pour contribuer à la restauration de la paix? J'en arrive à croire, la protection des Tutsi n'est pas la seule raison de l'existence du CNDP.

En effet, les Tutsi et les hutu sont aujourd'hui très représentés dans toutes les institutions issues des élections, ils travaillent dans les entreprises publiques et privées et dans les organisations humanitaires au même titre que les autres ethnies de la Rdcongo et ceci dans toutes les provinces du pays. Et, il y a lieu de se réjouir de voir  les liens d'amitiés se reconstruire entre les enfants, les élèves tutsis et les autres ethnies de la Rdcongo. C'est un réel plaisir pour tout congolais épris de paix d'observer les élèves au moment de la sortie des classes. Les enfants tutsi, hutu, bashi,…rentrent ensemble dans leurs communautés.

La question que je me pose alors est de savoir dans quelle mesure le groupe de Nkunda cantonné à Masisi et dans une certaine mesure à Rutshuru contribue à la protection de cette frange de la population congolaise. Les mouvements massifs des populations de ces deux territoires prouvent à suffisance que le CNDP renforce la précarité dans ces territoires ou résident la majeure partie des Hutu et des Tutsi du congo.

Certains pensent que le groupe de L. Nkunda sert de base arrière pour l'ancien mouvement rebelle RCD. Si de fois les points de vue de Ruberwa rencontrent ceux de Nkunda, tout le monde sait que l'ancien vice président de la Rdcongo ne partage pas les visées bellicistes de Laurent Nkunda. Il les a dénonce à plusieurs reprises quand il était vice président de la RDCongo a l'époque du 1+4.

Je doute fort que le RCD voudrait se reconstruire à partir du CNDP. Je crois quand même qu'au cas où la guerre du CNDP prendrait de l'ampleur et tendrait ou pire encore, arriverait à faire tomber les institutions actuelles de la Rdcongo,  beaucoup de leaders des ex mouvements rebelles en mal de positionnement, profiteraient de cette opportunité pour faire leur come back sur la scène politique et récupèreraient le CNDP. L'occupation de Bukavu par le CNDP il y a 3 ans a démontré que Laurent Nkunda n'avait pas des compétences des dirigeants politiques. Il a à plusieurs reprises fait appel aux anciens dirigeants du RCD qui n'ont pas répondu présents a cause notamment des exactions commises par les troupes de Nkunda a Bukavu. Mais Laurent Nkunda n'avait pas montré une capacité particulière à gérer la situation, bien qu'ayant profité des appuis avérés notamment de la MONUC et du Rwanda. (Voir la lettre des Pères Jésuites, les rapports des ONG des droits de l'homme du Sud Kivu… qui donnent tous les détails sur le déroulement de la guerre de Bukavu)

Tenant compte des appuis susmentionnés, Laurent Nkunda est-il un épouvantail qu'agiterait la communauté internationale pour faire peur au pouvoir de Joseph Kabila? Je pense que oui? Dans un compte rendu d'une réunion des humanitaire et ambassadeurs étrangers, réunion consécutive à la guerre entre les FARDC et les éléments du MLC de Bemba cantonnés à Kinshasa, la communauté internationale  ainsi représentée accusait Joseph Kabila d'installer une dictature rampante, le Ministre belge soutenait dans une réunion de la commission européenne que J Kabila était devenu "incontrôlable" , (à cause des contrats chinois), les institutions de Bretton wood lui en veulent aussi à cause de ces contrats salués pourtant par une grande partie de la population congolaise comme une des voies de sortie de la crise économique et d'accession à l'indépendance économique dont rêvait ce pays depuis 1960 travers son héros national Patrice Emery Lumumba. Certains casques bleus de la MONUC (bien qu'à titre personnel) ont exprimé leur sympathie pour Laurent Nkunda. Se sont-ils limités à ce soutien ? Certainement non. Car tout le monde sait que Laurent Nkunda  a bénéficié du soutien logistique informel ou pas de la MONUC lors des attaques de Bukavu. On sait que la MONUC a jugé prudent lors de cette guerre, de cacher l'information relative à la présence des troupes rwandaises en Rdcongo pour soutenir Nkunda. On sait que la MONUC, certains ambassadeurs apportent un soutien moral à Laurent Nkunda dont les justifications de la guerre sont estimées « légitimes ». On sait qu'à chaque fois que les militaires des FARDC ont été proches d'arrêter Nkunda et de mettre définitivement fin à la guerre au Nord Kivu, ils ont été traités de génocidaires par la communauté internationale. La peur de porter ce qualificatif et par ricochet de permettre à la communauté internationale de déstabiliser les institutions démocratiques, (La présidence, le gouvernement… ), ils ont dû revenir sur leurs positions. (Les congolais du Nord et du Sud Kivu n'oublieront pas de si tôt qu'ils doivent la persistance de l'insécurité dans leur province au blocage de l'avancée des troupes du Colonel Mayanga qualifié alors de génocidaire par les ambassadeurs des pays occidentaux. On sait qu'actuellement, le CNDP est traité comme un mouvement rebelle à part entière. Sous l'impulsion de la communauté internationale, il a signé des accords de paix avec la Rdcongo (Le ridicule ne tue pas). On sait que la MONUC joue plus un rôle de force d'interpositions empêchant les uns et les autres de se piquer des positions militaires. L'actuel commandant des forces de la MONUC a soutenu que la présence et les actions de la MONUC se fondent uniquement sur l'acte d'engagement signe par les belligérants lors de la conférence de paix. Ce document est désormais la seule base juridique de sa présence en RDCongo. (Est-ce –logique ?)

La question que je me pose est la suivante : « Qu'est ce qui justifierait le mieux la présence dans un pays d'une mission en période post conflit mieux post électorale si ce n'est la volonté de protéger et de donner une assise durable aux  institutions issues des élections libres, indépendantes et démocratique contre tous groupes armes ? ». Telles étaient après les élections, les déclarations du Représentant Spécial du SG et de son adjoint après les élections.

Qu'est ce qui a changé depuis lors ? Pourquoi la MONUC et la communauté internationale traitent t'elles sur un même pied d'égalité un gouvernement issu des élections démocratiques sur et un groupe armé en mal de fondement politique et idéologique suffisant et convaincant?

C'est là l'ambiguïté que les populations congolaises reprochent aujourd'hui à la communauté internationale (A Rutshuru ou vivent les tutsi et les hutu sensés être protégés par Laurent Nkunda, les populations ont jeté sur les véhicules et les militaires de la MONUC a qui elles reprochent de soutenir Laurent Nkunda). C'est cette ambiguïté qui nourrit l'opinion du citoyen moyen qui pensent à tort ou à raison que pour les fonctionnaires de la MONUC et les humanitaires en postes dans ce province l'adage : « NO NKUNDA, NO JOB » se justifie. Quel que soit les visées cachées de la MONUC et de la communauté internationale, il leur sera de plus en plus difficile de justifier sa présence en Rdcongo. La seule protection des civils « déplacés » et vivant dans des sites de fortune semble une hypocrisie car pour beaucoup des congolais, la MONUC devrait aider le gouvernement congolais à sécuriser ces populations dans leurs milieux d'origine. Personne au Congo n'accorde un quelconque crédit aux multiples déclarations empreintes d'hypocrisie que lance à tort et à travers la communauté internationale représentée par la « facilitation internationale » . Les congolais pensent que la MONUC, la facilitation internationale et les humanitaires ne font aucun cas des personnes déplacées. Que le mouvement des populations avec son cortège des misères n'est instrumentalisé s que pour faire du chantage au gouvernement congolais, pour le mettre à genoux et le cas échéant pour le destituer.

La troisième question est la suivante : « est ce que Laurent Nkunda se bat pour éviter la justice internationale? » Beaucoup d'analyste pense que la paix ne procurerait à Nkunda aucun bénéfice. Bien au contraire sa sortie du maquis l'exposerait au châtiment que lui réserverait la communauté internationale. On sait que les signataires de l'acte d'engagement issu de la dernière conférence pour la paix ont résolument refuse de lui accorder (ce qui serait une aberration flagrante) une immunité pour les crimes de guerre, les crimes contre l'humanité et les crimes de génocide. Bien qu'aucun mandat n'aie été jusque là délivré par la CPI contre Nkunda, son adjoint Bosco Ntaganda fait déjà l'objet d'un mandat d'arrêt. Par ailleurs, l'expérience de Bemba, ancien vice –président de la RDcongo, est assez instructive. Nkunda sait qu'aussitôt sorti des maquis, la communauté nationale et peut être internationale se rappelleraient des massacres de Kisangani, des crimes de guerre commis à Bukavu sans compter le recrutement des enfants et les viols dont le CNDP se rend coupable ces derniers temps. Arrêter les combats au Nord Kivu et sortir du maquis sans avoir gagné la guerre  équivaudrait à un suicide militaire, judiciaire et politique pour Laurent Nkunda. Même s'il le voulait, son instinct de conservation l'empêcherait d'arrêter la guerre.

La gestion du phénomène Nkunda par le gouvernement laisse plus d'un congolais dubitatif. Le gouvernement semble jouer le jeu de la communauté internationale. Il est en parfait décalage avec le point de vue de la population. Pour celle-ci, il faut en découdre une fois pour toute avec Laurent Nkunda s'ils ne respectent pas ses engagements. (Peut'il les respecter?). L'accueil réservé dernièrement par les populations de Minova au gouverneur du Sud Kivu qui tentait de  les sensibiliser sur le bien fondé de la présence de la MONUC, (il a été renvoyé à jet de pierre), la récente déclaration de l'ONG COJESKI sur l'insécurité au Nord et au Sud Kivu sont assez expressifs.

En conclusion, les tensions ethniques resteront une réalité vivante en Rdcongo. Mais les tutsi et les hutus se portent bien en RDCongo sans l'aide de Nkunda. Après avoir vécu plus de 12 ans de guerre à l'Est de la RDcongo, les ethnies en ont ras le bol. Par conséquent, la présence du CNDP contribuera à provoquer l'émergence de la xénophobie à l'égard des rwandophones. Si jamais la guerre du CNDP s'étend sur l'ensemble du territoire congolais, les autres ethnies risquent à long terme de percevoir les tutsi comme une ethnie aux velléités hautement bellicistes.

Les congolais pensent que l'armée nationale est encore trop faible et qu'au lieu, de gérer les conséquences des affrontements (mouvements de populations, crises humanitaires… ) au lieu d'assister quasi passivement à ces affrontements,  la MONUC et d'autres intervenants nationaux et internationaux intéressés devraient contribuer au renforcement de l'armée congolaise, à son équipement pour la rendre en même de répondre à toute sorte d'agression intérieur ou extérieur. Le cas échéant, la MONUC devrait s'impliquer fortement pour mettre hors d'état de nuire et cela définitivement les groupes armes étrangers et nationaux.

Le gouvernement de la RDCongo devrait exiger ce comportement de la MONUC et d'autres partenaires internationaux. La paix en Rdcongo est à ce prix.

Déo NAMUJIMBO
JOURNALISTE INDEPENDANT
- Correspondant Reporters sans frontières, agence de presse InfoSud/Suisse, magazine féminin AMINA ... à l'est de la Rd Congo
- Vice - Président Union nationale de la presse du Congo (UNPC), section du Sud-Kivu
- Président Union des Ecrivains congolais (UECO) au Sud-Kivu (Rdc)
Domicile : 18, avenue Kindu, Bukavu (Rdc)
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Ma devise : Je n'ai ni bombes ni fusils. Mes seules armes sont la loi
et la justice, la plume et le papier.

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